Pépita D. 25 ans à tisser du métier !

Lorsqu’on prend le temps de scruter la carrière de Pépita D., ce qu’on en retient, c’est ce parcours atypique qui, à la faveur d’orientations personnelles et de choix décisifs, va, de façon irréversible, propulser la styliste, créatrice de mode au-devant de la scène internationale. Certains diront qu’elle avait une vocation, une destinée. Et pourtant, Pépita Djoffon est issue d’une famille où très tôt les parents l’entourent d’une affection toute particulière ; elle sera chirurgienne ou avocate lui prédisait-on. En effet, son intelligence et son habileté, alliée à sa dextérité et son zèle suscitaient et alimentaient déjà à l’époque les commentaires les plus fantaisistes à son endroit ; sa destinée semblait allait de soi.

C’est oublier l’environnement socio-culturel dans lequel grandira Pépita qui affichait déjà une forte personnalité aux dires de ceux qui l’ont connu. Dès son enfance, elle baigne dans un univers où foisonnent les motifs, bas-reliefs et bronze à l’instar de ceux qui décorent et ont fait la réputation des palais des Rois d’Abomey ; ces référents culturels auront une influence décisive sur l’ensemble de son œuvre. Elle en héritera le souci du détail, l’audace, l’intelligence et la subtilité du discours.

Comme pour souligner cet objet qui symbolise si bien sa passion, Pépita a choisi le D pour se distinguer ; la marque acquiert rapidement une solide réputation. D’évènements en défilés, elle tisse progressivement sa notoriété sur le continent et en France où elle fit ses premières armes.

Pépita Djoffon est en effet un pur produit de ESMOD, la prestigieuse école de stylisme et modélisme de Paris ; ici ne rentre pas qui veut. C’est là qu’elle y fera son apprentissage à partir de 1988 ; c’est aussi dans l’hexagone qu’elle va parfaire sa formation grâce à des stages au sein de maisons de couture de renom dans la capitale du luxe et de la beauté. Pépita sait que le chemin pour parvenir à la réussite n’est pas un long fleuve tranquille ; il est parsemé d’embûches et souvent semé de désillusions ; dès lors, elle va se forger un tempérament dans un univers rude et prolifique. Ses longues soirées d’hiver, stoïque, elle les passe à dessiner des modèles, à coudre, à créer. Son identité hybride lui sera d’un apport capital et insoupçonné.

A 20 ans, alors qu’elle est encore en train de se perfectionner à Paris, elle a l’audace d’organiser son premier défilé qui connut le succès qu’on lui prédisait. Encouragée par cette première expérience aussi exaltante qu’inédite, elle s’envole vers d’autres horizons. Sa terre natale qui constitue une source foisonnante d’inspiration lui manque ; elle décide ainsi en 1991 de s’établir à Cotonou (Bénin) pour écrire une nouvelle page de son histoire. C’est un tournant essentiel dans la carrière de l’artiste.

De cette période, date l’identité qu’elle va, au fil du temps, façonner et asseoir. Pépita D, ce sont des lignes épurées qui confèrent fluidité et volupté ; les modèles avant-gardistes qu’elle créée, connaissent un succès fulgurant car ils révèlent la femme, la vraie dans toute sa splendeur et sa dignité, avec ses formes scripturales qui ne sont pas sans rappeler la statutaire fon et yoruba. La pointe d’audace qu’elle y rajoutera par la suite, n’a rien de provocateur ou vulgaire; au contraire, les matières et les formes jubilent dans un savant et subtil dosage dont elle seule connait le secret et qui donne à ses modèles sens, intelligence et équilibre. Pépita D revendique ce classicisme teinté d’un zeste d’impertinence ; c’est la marque de fabrique de la maison. Alors qu’elle fête ses 25 ans de carrière, Pépita D a su, au prix d’une abnégation et d’une dextérité, rare dans le métier, dompter la matière en s’élevant pour donner de la hauteur à ses créations. Cela lui vaudra de nombreuses distinctions, certes honorifiques, mais qui attestent de son talent et de son savoir-faire : jean’s, pagne, wax, damask, lin, java, mousseline… se révèlent sous un autre jour et un angle inédit et inattendu ; l’histoire de Pépita D s’écrit aussi en lettres d’or sur le fronton des podiums grâce à une écriture originale, dense, contemporaine et riche d’apports multiples.

Il serait fastidieux de lister ici les évènements auxquels elle a pris part au regard de la notoriété grandissante de la marque et son corollaire,… les sollicitations les plus diverses. Pépita D. a toujours été présente aux grands rendez-vous de la mode. De 1993 à 1995, la griffe est représentée au Salon du Prêt-à-porter de Paris ; en octobre 1994, elle est invitée au défilé de mode inaugural du Salon International de l’Artisanat de Ouagadougou (SIAO) au Burkina Faso ; elle participe ensuite à Modafolies à l’occasion du Sommet de la Francophonie organisé à Cotonou en décembre 1995. En sa qualité de Membre de la Fédération Africaine des Créateurs (FAC), elle fait partie, en novembre 1997, des stylistes du Kpalezo (mode, textile et design) à Abidjan (Côte d’Ivoire) ; invitée à SIMATEX à Dakar (Sénégal) en décembre 1997, elle en reviendra avec les idées bouillonnantes plein la tête et prête à en découdre. En effet, les turbulences socio-politiques de ces années font bouger l’Afrique ; des mutations irréversibles sont en train de s’opérer ; elles auront inéluctablement des incidences culturelles sur les manières d’être, de faire… et de s’habiller. Cela l’interpelle.

C’est fort justement en novembre 1998 qu’Alphadi, le couturier nigérien, lance du haut des dunes de Tiguidit, non loin d’Agadez en plein désert de l’Aïr Ténéré, le Festival International de la Mode Africaine (FIMA) pour une reconnaissance des stylistes africains. Pépita D. fera plus que participer à ce combat puisqu’au-delà de cette 1ère édition ; elle prendra part aux suivantes, notamment celle d’octobre 1999 où le célèbre styliste l’invite à célébrer l’Afrique sous les lambris dorés du Carrousel du Louvre à travers un défilé mémorable aux côtés de ses pairs africains et occidentaux.

Le 8 décembre 2001, Pépita D fête ses 10 ans de carrière au Centre International des Conférences de Cotonou en sublimant ses collections sous la forme d’une rétrospective glamour avec Boncana Maïga et Garo Hasbanian qui signe les magnifiques coiffures devant un public tout aussi séduit que médusé.

Les nombreux évènements organisés sur le continent n’ont cessé de révéler la fibre créatrice de l’artiste ; pêle-mêle, on peut citer : Koras Fashion Award en octobre 1999 à Sun City (Afrique du Sud), Tendances Party (2006), AfrikFashionShow (2012) à Abidjan (Côte d’Ivoire), la Biennale de la Mode au Togo (BIMOD 228), SiraVision (1ère édition en 2006, puis 2008, 2009, 2013) à Dakar (Sénégal)…

VLISCO, soucieuse de consolider son implantation en Afrique et d’assurer le rayonnement de la marque dans la sous-région, amorce à partir de 2008 une collaboration avec Pépita D. grâce à la mise en place d’un partenariat stratégique. Cet accord se concrétise par la création de modèles exclusifs en wax hollandais pour la prestigieuse firme VAC et la participation à des évènements d’envergure tels que le Ghana Fashion Week (2009) et des défilés dans les capitales africaines : Cotonou, Ouagadougou, Kinshasa, Lomé. En 2008, en marge du sommet de la CENSAD à Cotonou, elle participe au défilé de gala de clôture, puis en 2009, elle organise dans la même ville un défilé de charité en faveur des enfants malades du noma en y associant les grands noms de la haute couture en Afrique comme Alphadi, Imane Ayissi, Jean Doucet, Claire Kane, Gilles Touré, Pathé O’…Cette même année verra sa participation au PANAF d’Alger (Algérie).

Entres autres distinctions, on peut citer sa nomination avec 3 autres créatrices de l’Oscar de la mode africaine à Abidjan en décembre 1998 ; elle recoit en février 2002 au Nigéria le 2ème prix d’ECO FEST- Festival de la culture, de l’art et de la mode ; de 2002 à 2005, elle a été nommée Ambassadrice du Fonds des Nations Unies pour les populations (FNUAP- Bénin) afin de sensibiliser les jeunes filles en milieu urbain sur les IST et la scolarité.

Site web : http://www.pepita-d.com/

Haute couture: Collection de DJOFFON PEPITA